Tête à tête avec François Daubinet, Chef Pâtissier
Je suis son travail depuis le Crillon. J’ai fêté mes 40 ans lors d’un cours qu’il dispensait à la Masterclass de Christophe Michalak. Celui que je rencontre aujourd’hui fait partie des Chefs Pâtissiers les plus doués de sa génération. Son travail, sa créativité, sa vison du métier, et sa personnalité lui confèrent une identité sucrée à nulle autre pareille.
Les photographies qui illustrent ce billet ont été prises lors d’une précédente rencontre au Taillevent, quelques jours avant son départ. Sachez qu’il fut difficile de savoir sous quel angle photographier ses créations tant les textures, les formes, la construction étaient belles sous tous les angles.
Les assiettes de François Daubinet sont dressées avec une précision horlogère. Près d’une dizaine de préparations différentes sont délicatement disposées dans chacune. Côté saveurs, son audace, son goût de repousser avec intelligence les conventions impressionnent par leur subtilité, leur maîtrise et leur gourmandise.
Le Chef a accepté de répondre à mes questions alors qu’il vient tout juste de lancer sa société de conseil.
rencontre…
Les générations de Chefs Pâtissiers connus du grand public se succèdent. Vous faites partie de la plus récente. Quelles furent à vos yeux les grandes évolutions de votre métier ?
[su_quote] Gaston Lenôtre a ouvert le métier au grand public et mis au point les premiers desserts devenus de véritables classiques aujourd’hui, la Feuille d’automne, le Succès, Concerto… Plus tard Pierre Hermé et Philippe Conticini ont rapporté des saveurs, des techniques venues d’ailleurs, une esthétique plus moderne, plus épurée. Christophe Michalak qui fait aussi partie de ces immenses Pâtissiers à lui tout particulièrement porté le métier devant les médias, entre autres choses. Désormais, grâce au travail de ces Chefs, je pense que ma génération, celle de gens comme Julien Alvarez, de Cédric Grolet, de Claire Damon…est celle l’audace. Nous cherchons à repousser les limites, tant sur le fond que sur la forme.[/su_quote]
Quelles avancées matérielles et techniques majeures vous ont aidé ?
[su_quote] Aujourd’hui nous pouvons thermoformer nos moules, cuire sous vide à basse température et conserver ainsi au produit un maximum de ses qualités d’origine. Il y a aussi l’utilisation du silicone pour le froid négatif, le silplat….[/su_quote]
Et côté produit ?
[su_quote] Je pense que le sourcing est également devenu plus simple avec les années. Grâce à Internet, aux réseaux sociaux, aux médias, les informations circulent plus vite. Les fournisseurs nous envoient directement des informations ; nous pouvons échanger avec eux beaucoup plus facilement et rapidement que par le passé. [/su_quote]
Aujourd’hui on parle plus aisément de compétences transverses entre cuisine et pâtisserie
[su_quote] Oui c’est vrai, mais je pense que le résultat est plus important que la technique. Aujourd’hui l’on communique et l’on s’observe tous entre nous que l’on soit sucré ou salé. Je regarde avec attention ce que savent faire les cuisiniers et je reproduis ce qui m’intéresse. J’utilise des techniques comme la cuisson sous vide par exemple pour cuire une belle poire ou une belle pomme caramélisée, je travail des jus.. Il peut m’arriver d’utiliser des condiments, des épices (voir précédent billet, sur les desserts du Taillevent). Beaucoup de passerelles sont possibles. [/su_quote]
L’audace et de le talent sont parvenus à sublimer un produit pratiquement entièrement composé d’eau – L’assiette est juste merveilleuse.
Comment trouve t-on l’inspiration quasi permanente pour créer des desserts tels que les vôtres ?
[su_quote] Les idées ne viennent malheureusement pas comme ça je n’en ai pas tous les jours (sourire). Je crée en fonction de mes envies et des nombreuses choses qui m’inspirent dont l’art particulièrement. Notre métier à haut niveau induit effectivement un renouvellement régulier de nos créations. La scène parisienne, les saisons, les événements calendaires appellent sans cesse la nouveauté et j’aime ça. Le talent de mes confrères pousse aussi au dépassement de soi. Tout cela est très motivant et c’est que j’aime. Lorsque l’on devient Chef Pâtissier, la création devient primordiale et l’on y consacre plus de temps. [/su_quote]
A la fin d’une présentation de vos desserts chez Taillevent, vous avez invité l’ensemble de votre équipe à se présenter à nous, ce qui est plus que rare. Le travail et l’humain semblent importants dans votre travail. D’où cela vous vient-il ?
[su_quote] C’est juste. Je fonctionne ainsi. Le management des équipes est quelque chose auquel je tiens beaucoup. J’aime que les personnes avec qui je travaille aient envie d’être présents chaque matin au labo. J’aime que chacun soit heureux dans son job et vive sa formation à mes côtés comme quelque chose d’enrichissant professionnellement et humainement car le métier n’est pas facile. J’adorerais pouvoir faire profiter les autres de mon expérience, transmettre et convaincre des résultats probants de ce type de fonctionnement [/su_quote]
La réécriture du gâteau « 3 chocolats » que l’on trouve habituellement en pâtisserie sous forme de mousses superposées est juste une réussite. Un dessert…solaire !!
De quel oeil voyez-vous la médiatisation du métier ?
[su_quote]D’un oeil très positif (sourire). C’est bien entendu un plus. Il a fallu attendre longtemps avant que l’on commence à mettre les Chef Pâtissiers en avant. Comme je le disais Christophe Michalak a ouvert la voie. La médiatisation nous permet de montrer ce que nous savons faire, de nous exprimer, de revaloriser le métier et donc de faire évoluer doucement les rémunérations.
La notoriété créée de nombreuses sollicitations en France et à l’international. Quand j’ai commencé, pâtissier était encore une voie de garage aux yeux de la majorité des gens alors la médiatisation, oui, ça a du bon.
Attention tout de même à rester la tête froide et à ne pas trop déserter le labo (sourire)[/su_quote]
Une ode à ce petit fruit délicat et parfumé pleine de générosité et de fraîcheur.
Après Taillevent, vous vous lancez dans le conseil ; une nouvelle corde à votre arc ?
[su_quote] Une nouvelle étape, une parenthèse de quinze heures par jour (sourire). Je travaille différemment et désormais pour moi. J’avais envie d’utiliser mes compétences autrement et de tester d’autres de choses avant de repartir dans une autre belle Maison. Du coup je peux travailler sur des sujets auxquels je n’avais pas forcément accès auparavant comme m’intéresser de manière plus globale au à la formation, au management. Je peux faire plus de démonstrations, de stages, de voyages… J’ai beaucoup de projets.
Je croyais avoir du temps et pourtant je cours déjà partout (sourire). Je me donne une année pour voir ce qu’il se passe. [/su_quote]
parcours en quelques dates clés
Il voulait étudier les volcans et c’est en observant le travail du sucre tiré qu’il décide de se tourner à 15 ans vers le monde du sucré et choisit débuter chez les Compagnons du Devoir.
- 2005 CAP pâtissier
- 2007 CAP chocolatier
- 2007-2009 Chef de partie – Financier Patisserie NYC
- 2009-2011BTM pâtisserie
- 2010 CAP boulangerie
- 2011, les équipes de l’un de nos récents MOF pâtissier (Meilleur Ouvrier de France) Jérôme Chaucesse, à l’Hotel de Crillon.
- 2013 un poste de Chef de partie Christophe Michalak et Jean-Marie Hiblot au Plaza Athénée,
- puis la Michalak Masterclass
- Taillevent en 2015. Thierry Gardinier et le chef Alain Solivérès
[su_quote]Vous l’aurez compris, les desserts du Chef Pâtissier François Daubinet sont de véritables moments de bonheur. Si vous croisez son chemin, lors d’une démonstration, d’une masterclass et avez l’opportunité de déguster l’une de ses créations ne la manquez pas. C’est dingue !
Merci Chef :-)[/su_quote]
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